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MC Solaar

Les vrais héros ne meurent jamais. Aux côtés de IAM et NTM, MC Solaar fait partie de ceux qui ont donné ses lettres de noblesse au rap dans notre pays en lui apportant une audience beaucoup plus large que celles des terrains vagues ou des barres d’immeubles où il était jusqu’alors confiné. Dans ces années 90 sa plume précise et ludique l’a conduit aux plus grands succès. Ses hits “Bouge de là”, “Caroline”, “Nouveau Western” ou “Solaar Pleure” pour n’en citer que quelques-uns, ont traversé les décennies, aimantant sans cesse les nouvelles générations vers la magie MC Solaar. Et aujourd’hui, sept ans après l’album Géopoétique, le conteur-poète va à nouveau nous enchanter avec un nouveau projet dont l’originalité va de pair avec son inventivité.

Claude M’Barali (son vrai nom) a vu large, et même très large, pour une aventure excitante, pour lui comme pour nous, qui se déclinera tout au long de l’année en trois parties discographiques associées à une grande tournée de plus de cinquante dates. “Ce projet m’a redonné le sourire parce que c’est la première fois que je suis en concert en même temps que la sortie d’un disque et je peux sentir la chaleur des gens” raconte-t-il justement dans un sourire.

Cette verve nouvelle épate même son auteur qui avoue n’avoir jamais autant réalisé de morceaux de toute sa carrière en une période aussi réduite. A la base, une envie de se précipiter en studio. Car la méthode Solaar n’a pas changé. C’est seulement au moment d’enregistrer des chansons, lorsqu’il entend les sons qu’on lui propose, qu’il couche frénétiquement sur du papier ce que son inspiration bouillante lui dicte.

Première salve de ce triptyque annoncé : Lueurs Célestes. Sept titres étincelants où le flow de Solaar jongle plus que jamais sur des mots dont la signification s’éclaire souvent après plusieurs passages. La marque des grands. Démonstration dès l’ouverture, “Pierre-feuille”. Un démarrage en mode baile funk conçu par l’excellent Tom Cruz où Claude obsédé depuis très longtemps par les sonorités en “ao” réalise un exercice de style assez hilarant il faut bien le dire.  Réunir Mao, Étienne Daho, Macao et chaud cacao, sous le même étendard, c’est fort. Fini de rire, l’ambiance se fait soudain plus mélancolique et personnelle (J’crois qu’j’vais vous dire la vérité/Parler avec sincérité/j’étais perdu dans la cité/Dans les ténèbres, l’obscurité) “On court” et ses effluves “western-amérindien” est une sorte d’histoire de vie à tiroirs où l’ego trip s’efface pour parler à tout le monde. Mais pas trop longtemps, car le “moi je” rejaillis sur le très Caribéen “Modernidad” où on retrouve Tom Cruz aux manettes mi-salsa mi-rumba. Ce que l’on pourrait appeler déjà un classique.

“Big Data” annonce l’arrivée du producteur Dany Synthé dans la galaxie Solaar. Une guitare diaphane pose le climat tandis que le rappeur se livre à un constat désabusé, mais juste sur le monde qui nous entoure (Nous n’sommes que des données dans le big data/C’est la cata). Fred Savio est à l’origine du formidable groove funky de “Ils Dansent” qui nous conduit à onduler sur le dancefloor. Effet feel good garanti. “Carpe Diem” la chanson peut-être la plus intime du disque voit Claude laisser tomber provisoirement le rap pour se mettre à chanter. Une belle surprise très émouvante, car c’est un peu sa vie qui défile entre nos oreilles, orchestrée par la paire Stan-E et Christo K. On retrouve le premier à la manœuvre sur la remuante conclusion “Comptine”. Pas forcément du genre à passer en boucle à un nourrisson (quoi que…). La plume de Solaar se livre à un constat social acéré, dénonçant avec finesse greenwashing et catastrophe écologique (Ça sent le roussi/J’peux pas me la couler douce). Quand arrive la fin de ces premières histoires, on n’a qu’une hâte, écouter très vite les deux prochains volets d’un triptyque qui s’annonce époustouflant.

Avec ce nouveau projet discographique, MC Solaar apparait plus affûté que jamais. Dans une forme olympique même, en retrouvant ainsi le niveau étourdissant de ses débuts. Ses lueurs célestes brillent de mille feux. Vive le roi Solaar.

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